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title: "L'écriture numérique est collective"
date: 2024-01-12
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Résumé : En suivant les pensées de l'éditorialisation et de l'énonciation
éditoriale, l'écriture numérique n'est plus le seul produit d'une fonction
auctoriale, mais d'un ensemble de fonctions éditoriales dont la fonction
auctoriale fait partie.
Cet ensemble comprend à la fois des interventions humaines mais aussi des
interventions réalisées par la machine, à travers une série de choix
technologiques particuliers, que l'on peut englober sous le terme de chaîne
éditoriale.
Selon ce dispositif, et puisque notre hypothèse positionne l'intime en tant que
produit de l'écriture, nous pouvons nous demander si l'ensemble des fonctions
éditoriales ne participeraient-elles pas à produire l'intimité du chercheur et à
transformer ainsi l'intimité en intimité collective ?

[Note : il s'agit certainement de la problématique de toute la thèse, dans cette
partie on peut se focaliser uniquement sur l'apport de la machine dans cette
intimité (et les autres chapitres sur peer review entre autre et les mémoires)]

Parmi toutes les fonctions éditoriales que l'on pourrait énumérer, nous allons
nous concentrer sur la fonction écriture de l'architexte.
Cet environnement peut être découpé en deux parties : les logiciels et les
matériels.
En fonction de la configuration choisie pour écrire, un auteur peut écrire d'une
certaine manière et pas d'une autre.
Yves Jeanneret et Emmanuël Souchier emploient la notion d'architexte pour
expliquer la 
Pour montrer les particularités d'un environnement, une étude sur l'environnement
d'écriture avec l'éditeur de texte sémantique Stylo

## L'écriture numérique

### La controverse sur l'écriture

Définir l'écriture tient généralement de l'anthropologie ou des lettres, la
controverse à ce sujet est très large.
Christin en dresse la cartographie en distingant deux tendances principales :
l'écriture selon les traces ou selon les signes. Dans un cas comme dans l'autre,
ce qui défini finalement l'écriture est l'inscription dans la matière.

### Les particularités de l'écriture numérique
Crozat Bachimont Petit Bouchardon Kembellec Merzeau Vitali-Rosati Kittler

- calculabilité
- la frappe sur le clavier est désacouplée de l'acte d'inscrire (si l'acte
d'inscrire défini l'écriture, c'est la machine qui écrit et pas l'auteur, mais
qu'écrit-elle ?)

L'écriture numérique se distingue en premier lieu par sa caractéristique
computationnelle : elle est calculable (Crozat, Bouchardon, Petit, Kembellec.
Vitali-Rosati, Kittler, Bachimont, Merzeau).
Ce qui veut dire que, dans un environnement informatique, chaque signe que l'on
peut y inscrire à son pendant unique sous forme de _bites_.
Lorsque chaue caractère peut être identifié en tant que nombre, il devient
possible d'implémenter ce modèle dans une machine et de lui demander, sous forme
d'instructions, d'appliquer des calculs. 

Exemple de Turing (cf machine de Turing).

Le passage du signe à l'unité atomique et discrète qu'est le nombre signifie un
changement de représentation du monde (cf _worldview_ de K. Hayles) : le monde
n'est plus signifié par des mots ou des concepts mais le devient par des
chiffres.
Comme McLuhan nous le rappelle dès 1964, les alphabets composés de lettres
(contrairement à ceux composés de pictogrammes) sont asémantiques.
Si toutefois les alphabets sont liés à une culture d'où ils émergent,
l'abstraction nécessaire pour représenter le monde sous forme de chiffres
détacherait _a priori_ cette vision de tout sens.
Quelle que soit le langage utilisé pour écrire `3`, `trois`, `three`, `III`,
`0011`, `zéro zéro un un`.

[à détailler après avoir lu la partie sur le code de Herresnchmidt.]

La contrepartie de cette perte de signification est que le numérique gagme cette
particularité d'être calculable et mesurable.
Dès lors, il devient possible de mesurer des distances ou des écarts entre des
lettres, des mots ou des concepts, des données dans un environnement donné.

[ajouter une note sur le propos de Luca Paltrienieri]

L'écriture numérique est ainsi à distinguer de l'écriture dans un environnement
numérique donné : l'informatique.
Cette représentation numérique du monde n'est pas nouvelle et ce n'est pas
l'ordinateur qui l'a apporté.
À notre connaissance, son origine remonte aux prémices de l'écriture et des
développements des systèmes monétaires, nous dit C. Herrenschmidt (2007).

L'écriture numérique se distingue également des autres types d'écriture par le
fait qu'il s'agit de la première écriture où le geste d'écrire ne correspond pas
à l'action d'inscription du signe sur son support.
Lorsqu'on appuie sur une touche du clavier, la lettre n'est pas inscrite à
l'écran : on donne une instruction à la machine d'inscrire un signe dans le
disque dur, puis de l'afficher à l'écran dans un logiciel particulier (Kittler,
Souchier, etc).



### Détails de l'action d'écriture dans l'ordinateur
#### Fonctionnement du hardware

De la machine en local (clavier, souris, écran, carte mère, RAM, alimentation,
microprocesseur, etc.)

Aux machines distantes (Serveurs, fibre optique, ADSL ... Histoire de l'Internet
physique)
#### Fonctionnement du software (les différentes piles)

Bios, OS, Logiciels, réseaux (protocoles HTTP, TCP/IP, IMAP, POP, REST,
GrapHQL), communication entre les différentes couches et fonctionnement de
l'inscription dans le disque dur (HDD et SSD).

#### Conclusion 
Ce que l'on remarque en regardant de près cette configuration de l'environnement
d'écriture numérique est qu'il n'est pas possible d'écrire sur le disque dur
sans un agent intermédiaire : le logiciel.
## L'architexte écrit dans le textes
### Définir l'architexte
Sans l'intervention du logiciel comme médiateur entre l'être humain et le
support d'inscription de l'écriture numérique, il ne serait pas possible pour
l'auteur d'écrire dans cet environnement.
Si l'on considère l'écriture comme le geste d'inscrire une trace ou un signe
dans un support, alors l'écriture numérique n'est plus un fait humain mais un
acte réalisé par l'ordinateur lui-même.

L'interaction entre un humain et une machine consiste en une série
d'instructions que donne l'utilisateur à la machine qui, ensuite, les
exécute.
Le mécanisme sous-jacent à ce que l'on considère communément comme l'écriture
numérique (frapper une touche du clavier et voir la lettre s'afficher à l'écran)
s'avère plus complexe.
Le moment de la frappe n'est plus le moment où le symbole est inscrit dans le
disque dur, mais est le moment où une instruction est donnée à l'ordinateur qui
ensuite se charge d'inscrire la lettre correspondante sur le disque dur (sous
forme binaire).
Si l'on se trouve dans le cas de figure de la saisie d'un texte dans un éditeur
de texte, l'instruction suivante, selon les logiciels et les actions souhaitées,
consiste à afficher le symbole encodé sur le disque dur à l'écran.

Pour réaliser ces actions, Yves Jeanneret et Emmanuël Souchier partent de ce
constat qu'il n'est pas possible d'écrire un texte sans qu'un autre texte soit
déjà présent pour réaliser cette action.
Ce texte particulier qui pré-existe toute activité numérique est nommé
_architexte_ (refs x, x, 2019).

L'architexte a d'abord été employé en littératures par Gérard Genette (ref) et
désigne ...XXX.

En 2019, dans l'ouvrage intitulé _Le numérique comme écriture_, Gustavo
Gomez-Mejia, Étienne Candel et Emmanuël Souchier résument la notion d'architexte
comme :

> Initialement défini comme une « écriture d’écriture » puis comme un
« dispositif d’écriture écrit », l’architexte s’avère être un point de passage
obligé pour toute activité numérique. Il n’y a effectivement pas d’écriture à
l’écran sans un architexte qui la rend possible, l’accompagne et la formate.
Pour la première fois de son histoire, l’homme a donc recours à des
« dispositifs d’écriture écrits » spécifiques pour pouvoir pratiquer une
activité d’écriture (E. Souchier, 1998, 2013). Or, précisément en ce qu’ils sont
« eux-mêmes écrits », les architextes « sont des textes lisibles et
interprétables. Porteurs et prescripteurs d’une écriture à venir, ils anticipent
de ce fait une figure de l’auteur » (É. Candel, G. Gomez Mejia, 2013) et
relèvent donc de « l’énonciation éditoriale » (E. Souchier, 1998).

Globalement, l'architexte incarne le cadre dans lequel les agents peuvent
écrire.
Il permet de faire la distinction entre ce que Marie Depret-Lonnet (ref) nomme
gabarit, les espaces proposés par les éditeurs de logiciels ou applications pour
écrire, et le texte saisi par l'utilisateur, c'est-à-dire le texte qui vient
remplir le gabarit.
Cet architexte, ce  cadre, est régit par des règles qui définissent comment l'on
peut écrire mais surtout comment les signes à inscrire doivent être formatés.

#### Des exemples d'études mobilisant l'architexte

Goody


### L'architexte n'est pas qu'une surface

[Revenir sur Christin et sa critique de Goody]

Nous l'avons vu, l'architexte se positionne en tant que médiateur entre un
auteur et la machine qu'il emploie pour écrire.
Jusqu'à présent, nous avons vu que l'architexte

En 2019 Gomez Mejia, Souchier (+ref) étendent l'architexte (les cadres d'écrit
d'écran) à 4 cadres :

- le matériel
- le système (BIOS, OS, etc)
- le logiciel
- le document

[Description des cadres]

Ces cadres sont un début de réponse au dépassement de l'écran.
Néanmoins, plutôt que d'approfondir cette dimension invisible du texte, les
auteurs reviennent sur la couche graphique en ajoutant qu'« à cet enchâssement
de cadres, il faudrait encore ajouter ceux que composent, à l’intérieur même du
document, les rubriques, encadrés, cartouches, « boîtes de dialogue » ou autres
formes de cadres éditoriaux structurants pour le travail même du texte ».

De plus, toujours selon les auteurs :

> Le premier "cadre" [qui] définit les conditions de possibilités matérielles de
l’activité, est le seul inanimé. Les trois suivants, cadres système, logiciel et
document, relèvent de l’ingénierie textuelle et définissent les conditions de
réalisation de l’activité. On voit ainsi qu’une activité d’écriture réalisée sur
le « document » d’un logiciel de traitement de texte est mise en abyme au sein
de l’ensemble des autres « cadres » qui la rendent possible et la déterminent
techniquement et sémiotiquement.

Le fait de rendre la couche _hardware_ inanimée dans le production du texte
écrit et de renvoyer cette production aux couches supérieures crée deux
contradictions.
La première contradiction efface la fonction éditoriale du _hardware_,
considérée dès lors comme neutre ce qui, paradoxalement, irait à l'encontre de
l'énonciation éditoriale (Jeanneret & Souchier) dont l'intérêt est l'observation
des dynamiques de production de l'écriture.
La deuxième contradiction repose dans la perception du fonctionnement d'un
ordinateur.
Si l'on pousse ce raisonnement du matériel inanimé, la machine ne pourrait pas
inscrire le texte sur un disque dur.
Or, nous avons vu que, _stricto sensus_, c'est bien la machine qui réalise l'action
d'écrire/inscrire sur le support.
En rendant cette couche inanimée, on y perd la caractéristique de co-écriture
défendue par les auteurs auparavant.
De plus, le renvoi à la surcouche graphique ajoute un masque supplémentaire à ce
que nous essayons de voir en-dessous.
Ce que nous pouvons en comprendre est que, finalement, la notion d'architexte
telle qu'elle est construite par Souchier et al, est anthropocentrée et
s'appuie sur des conventions de lecture (_lettrure_) humaines.

Le dépassement de l'écran est un acte symbolique nécessaire pour se soustraire à
une vision anthropocentrée telle qu'elle vient d'être proposée.
Pour ce faire, revenons à l'écriture comme moyen de transmettre une information
au sein d'un système donné.
En l'astreignant à un système d'informations comprenant seulement des agents
humains, il devient difficile d'inclure l'ordinateur comme un agent agissant de
ce système.
Un effet qui nous conforte dans cette situation est justement l'écran et l'objet
virtuel que cet écran nous propose et qui nous réconforte dans notre usage de
l'ordinateur : la page.

### Dépassement de l'écran et de la page

Le terme « page » revient de manière récurrente dans nos usages de
l'ordinateur : on le retrouve dans les logiciels de traitement de texte (il y a
même un logiciel du nom de _Pages_ disponible dans l'environnement Apple), dans
les livres numériques ou encore dans le web où chaque URL est l'adresse d'une page.
Matthew Kirschenbaum détaille notamment la relation de l'utilisateur à la page
dans son ouvrage ...

[Ajouter une note sur Kirschenbaum]


Cet objet qu'est la page a été instauré dans l'ordinateur uniquement pour
reproduire une « habitude » et créer un lien fictif entre les visions du monde
de l'imprimerie et de l'informatique.
Cet artefact produit une forme de réconfort auprès de l'utilisateur pour que le
monde informatique lui semble plus tangible, qu'il ait quelque chose auquel se
raccrocher, d'où sa déclinaison dans des espaces différents, comme le web, qui
ne ressemble plus du tout à des pages au format lettre ou A4.
La page affichée à l'écran n'existe qu'à cet endroit, il ne s'agit que d'un
rendu graphique qui ne fait pas partie de l'écriture (au sens du texte saisi).

Le pouvoir de la page sur l'utilisateur est considérable étant donnée la nature
même de cet objet que l'on pourrait considérer comme l'un des seuls à être
virtuel et presque sans matérialité du point de vue de l'informatique.
Malgré tous les efforts effectués depuis son instauration à l'écran, la page
affichée n'est jamais la page imprimée car aussi précis que soient les détails
typographiques que l'on peut y ajuster, elle ne reflétera jamais le grain,
l'épaisseur, l'odeur ou tout autre caractéristique physique du papier.

La critique énoncée à l'endroit de la page ne doit pas être réduite à une
apologie d'un mode sans page.
Elle consiste plutôt à montrer qu'à vouloir préserver une habitude pour « ne pas
effrayer » l'utilisateur, la page fait écran devant l'ordinateur, non plus en
tant que simple machine, mais en tant qu'agent d'une énonciation éditoriale.

Cette peur de l'informatique relève essentiellement d'une peur que ce qui
définissait l'être humain lui soit arraché et devienne une caractéristique d'une
autre entité, ne permettant plus de définir l'humain en regard de ce que lui
seul est capable de faire (Vitali-Rosati).

Kittler à ce propos, nous rappelle qu'historiquement ce que les caractéristiques
qui définissent l'être humain sont souvent le symbole du pouvoir et désigne
plutôt les hommes alors qu'à l'instant même ou cette caractéristique devient
déchue, ce sont les femmes qui en héritent et deviennent les expertes en ce
domaine (Kittler ref).

Néanmoins, avant d'en arriver à cette émotion forte qu'est la peur et qui
traduit la non capacité à définir l'être humain, nous pouvons nous appuyer sur
la pensée de G. Anders et ressentir une forme de honte que l'écran camoufle.

Interagir avec une machine demande une certaine rigueur : qu'il s'agisse de
structurer un document ou de lui donner une série d'instructions (du code), une
machine ne peut interpréter l'ambiguité ou l'implicite culturel.
Cela veut dire qu'aucun échange humain-ordinateur ne peut reposer sur des
conventions culturelles de lecture et que l'instruction donnée n'a, en elle-même, aucun
sens.
Dès lors, comment admettre que quelque chose qui n'a pas de sens puisse en
générer ?

La honte (prométhéenne) d'Anders est alors double : d'un côté il y a un mélange
de fierté devant cette machine créée par l'être humain et de honte parce que
l'individu isolé devant la machine sait que ce n'est pas lui qui l'a mise au
point et, de l'autre, il y a cette honte à être face à un outil qui réalise une
action mieux qu'on ne le ferait soi-même alors que cette dite machine n'a aucune
conscience de ce qu'elle réalise.

Le dépassement de l'écran est une proposition pour poser un autre regard non
anthropocentré sur cette question de l'écriture numérique.
Il n'est p

En s'appuyant sur Kittler et sa très célèbre provocation « Es gibt keine
Software », traduit par « Le logiciel n'existe pas » ... 

Katherine Hayles s'inscrit sur les traces de Kittler et propose également une
nouvelle perspective sur l'écriture (My mother was a computer et how we become
posthuman + parole, écriture, code)...


Il y aurait donc une action du côté de la machine...
Le logiciel n'existe pas en tant qu'entité agissante.
Ce n'est ni un agent qui écrit (ni un médiateur).
C'est bien l'ordinateur qui écrit à travers les instructions qu'il reçoit (de
l'utilisateur et de l'éditeur du logiciel de par son code).
Ce qui se trouve entre l'ordinateur et l'auteur est du texte qui permet d'écrire
à la machine d'écrire du texte.
Dans sa conférence sur les logiciels, Kittler démontre que le logiciel est
ramené au mpeme niveau que le reste des écritures par l'ordinateur, c'est-à-dire
au niveau le plus bas (binaire).
En ce sens, les écritures des logiciels ne servent qu'à camoufler le
fonctionnement de la machine.
Un autre particularité des logiciels que souligne Kittler est qu'un logiciel ne
peut pas exister en dehors de son environnement numérique.

L'intermédialité montréalaise peut aider à expliquer ce phénomène (citer ref)

[expliquer intermédialité montréalaise]

Pour aller plus loin dans cette réflexion, nous pouvons même abolir la notion de
média au profit de celle de médiation en mobilisant le texte de Larrue et de
Vitali-Rosati (Media does not exist)...
Cette proposition de Larrue et Vitali-Rosati, qui s'inscrit directement dans la
lignée des travaux de Kittler, permet de faire abstraction de l'objet même
qu'est le média et de se concentrer sur l'interaction _entre_, la médiation.
Finalement, ce n'est pas l'étude du support (physique) qui doit faire l'objet
de l'étude mais la relation ou la dynamique, le _flux_, entre les différents
agents d'où émerge la matérialité.

Kittler fait la même proposition dans sa conférence _Le logiciel n'existe pas_.

Revenir sur la matérialité (en tant que propriété émergente, citer Hayles) du
texte qui est tout sauf affichée sur un écran : l'écran et surtout la surcouche
graphique de mise en page est une illusion créée pour le lecteur humain : elle
a son importance dès lors que le système d'informations prévoit des
destinataires humains mais elle en perd lorsqu'il s'agit d'étudier les relations
entre un ordinateur et un auteur.

Or le principal lectorat des textes numériques sont les robots : les textes
écrits sont écrits avec des machines et principalement pour les machines (c'est,
par exemple, pour cela que le documentaliste déclare formellement les
données)(citer Kembellec etc)

La quest

<!-- Une emphase en italique saisie dans le logiciel Microsoft Word ne sera pas
encodée de la même façon que dans le logiciel InDesign.

[ajouter les deux exemples d'encodage]

C'est en ce sens que l'architexte est le « porteur et [le] prescripteur d'une
écriture à venir » car il dépasse le statut d'interface neutre à l'écran et
devient l'agent qui balise, au sens littéral, le texte.

Néanmoins, cette définition de l'architexte le positionne comme un agent passif
qui ne dépasse pas le statut de cadre de l'écriture.
Or, n'est-ce pas l'architexte lui-même qui interprète l'instruction donnée et
l'applique, c'est-à-dire l'écrit, dans le texte ?

Si l'on reprend l'exemple précédent, lorsque l'on donne pour instruction
d'appliquer une emphase en italique à une chaîne de caractère, c'est bien
le logiciel (une des couches de l'architexte) qui inscrit l'emphase selon le
format qui lui est prédéfini.

Néanmoins, cette écriture réalisée par l'architexte n'est pas rendu visible à
l'écran.
L'affichage de l'écriture à l'écran respecte des conventions de lecture propres
à une culture, elles n'est que rarement affichée dans sa forme la plus verbeuse
(complète)  -->

### Ce que l'architexte inscrit dans le support

#### WYSIWYM vs WYSIWYG

Selon les formats d'écriture, et lorsqu'on sort du paradigme WYSIWYG pour celui
du WYSIWYM, on s'émancipe de la surcouche graphique pour entrer directement dans
la couche de la structuration des contenus.

_What You See Is What You Get_, ou WYSIWYG, est l'acronyme généralement employé
pour désigner les outils qui adoptent une surcouche graphique pour mettre en
page le contenu directement, au risque de ne pas structurer de la façon
souhaitée.
Le paradigme opposé, _What You See Is What You Mean_,...

Arrivé à ce niveau, l'agent humain ne dépend plus d'un logiciel particulier pour
saisir son texte mais peut faire le choix de l'environnement dans lequel il veut
travailler puisque le texte saisi l'est dans un format brut ce qui, a priori,
est réalisable dans tous les environnements de saisi.

Écrire en texte brut signifie également ouvrir les possibilités de structuration
du texte même : ce n'est plus Microsoft Word ou LibreOffice qui décident de
quelle manière sont structurées les informations mais le choix d'un format ou
d'une saveur particulière d'un format.

L'encodage d'un texte en XML illustre bien ce propos.
XML pour eXtensible Markup Language; est également un métalangage de balisage et
de modélisation du texte.
Plus souple que le HTML dont les balises sont figées, XML permet à chaque
utilisateur de créer son propre système hiérarchique arborescent par
l’élaboration de balises personnalisées.
Postérieur d’une décennie au HTML, la publication des recommandations de la
première version (1.0) du métalangage XML voit le jour en 1998.

La description rigoureuse permise grâce à cette technologie en fait un outil
utilisé à plusieurs fins notamment l’élaboration d’éditions critiques de
certains textes, qu’ils soient anciens ou nativement numériques ou encore la
description formelle de jeux de données (jusqu’à la création de bases de
données).
XML peut être associé à un autre langage, le XSL (eXtensible Stylesheet
Language), qui décrit comment doit être transformé le XML.

XML est un langage supporté par les navigateurs web et est facilement
transformable en HTML et compatible avec le CSS.

Que l'on soit sous système d'exploitation Linux, MacOS ou Windows, le XML peut
être saisi et lu dans tous les éditeurs de texte.
De plus, le XML a cette particularité de ne pas imposer de règles particulières
en dehors de la façon de structurer des informations avec des balises ouvrantes
et fermantes.
Chacun est en capacité de créer ses propres règles de structuration des contenus
en XML en créant un schéma (ensemble de régles qui déterminent les agencements
des différentes balises entre elles) qui correspond aux besoins de l'écriture.

Par exemple, lors de l'édition d'un article scientifique, comment pouvons-nous
définir un auteur ?
Si l'on écrit la chaîne de caractère "René Dupont" en bas du texte, nous
pouvons par convention de lecture deviner que "René" est le prénom de l'auteur
et "Dupont" son nom.
Or, pour l'ordinateur, cette chaîne de caractère n'est rien d'autre qu'une série
de caractères qui n'a aucune valeur sémantique.

Si l'on saisit cette même chaîne de caractères en XML, on peut commencer par y
ajouter une balise `<auteur>René Dupont</auteur>` pour signifier explicitement
qu'il s'agit de l'auteur du texte.

Toutefois, il est possible de préciser encore plus cette notion d'auteur, en y
ajoutant par exemple des balises `<prénom>` et `<nom>`.
La description de ce qu'est un auteur, pour l'écriture de cet article, devient
formelle et explicite.
Cependant, pour l'écriture savante, est-ce qu'un auteur est seulement un nom et
un prénom ?
En fonction des contextes de publication, il est possible qu'un autre agent, la
revue, définisse également l'auteur avec d'autres informations telles que
l'affiliation académique, une adresse courriel et un identifiant unique comme
l'ORCID.
L'auteur René Dupont prendrait alors la forme suivante :

```XML
<auteur>
  <nom>Dupont</nom>
  <prenom>René</prenom>
  <courriel>rene.dupont@parisuniversite.fr</courriel>
  <affiliation>Université de Paris</affiliation>
  <ORCID>XXXXXXX</ORCID>
</auteur>
```

Certains formats, comme nous venons de l'observer avec le XML, permettent de
choisir ce que l'architexte va écrire dans le texte. 


#### Définir le format
Le terme format est avant tout un terme technique, il délimite les
caractéristiques d’un objet. Ces caractéristiques sont formulées par un certain
nombres de données, d’instructions, ou de règles. L’objectif est de disposer
d’un consensus pour dialoguer autour d’un objet ou de faire communiquer des
processus qui traîtent ou qui produisent des formats.

Le format est une contrainte technique dans des environnements qui peuvent être
très divers : formats d’objets physiques comme le papier, formats informatiques
que nous connaissons par l’extension des fichiers sur nos ordinateurs, ou
formats littéraires concernant l’agencement des mots et des phrases.
Nous nous concentrons ici sur les contraintes techniques et informatiques.
En fonction des nécessités d’un système d’exploitation, d’un programme
informatique ou d’une plateforme en ligne, il faudra utiliser tel ou tel format.
Un format qui n’est pas standard (ces caractéristiques doivent être décrites),
qui n’est pas ouvert (il est possible de comprendre comment le format
fonctionne) ou qui nécessite un environnement très spécifique pour être lu ou
transformé va générer beaucoup d’obstacles pour son utilisation.

La contrainte du format est liée à d’autres contraintes comme la compatibilité
(quel format peut être lu par quel programme ou logiciel ?), l’interopérabilité
(est-ce que le format peut être utilisé de la même façon quel que soit
l’environnement ?), la dépendance (de quoi un système a-t-il besoin pour traiter
le format) et au libre/open-source (est-ce que le format peut être lu, modifié,
partagé ?).

Si le but du format est de constituer une série d’informations compréhensibles,
utilisables et communicables, il reste une contrainte forte pour les chaînes de
publication. Que ce soit en tant que format d’entrée, format pivot ou format de
sortie, il déterminera le fonctionnement de la chaîne.

Enfin, le choix d’un format se fait en fonction de deux paramètres essentiels :

- le temps : est-ce que le format va devenir obsolète et ne sera plus reconnu
par le ou les programmes de la forge ?
- la communauté : y a-t-il d’autres personnes en mesure de comprendre le format
et d’apporter de l’aide (cas d’usage, solutions techniques, etc.) ?

### Assujetissement à l'architexte et aux formats

Il y a un rapport de force qui s'instaure entre l'éditeur de l'architexte et
l'utilisateur.
Dans le cas d'un logiciel de traitement de texte, lorsque, par exemple,
Microsoft propose une modification de la police par défaut dans une version
actualisée de son logiciel MSWord, Microsoft change également les manières
d'écrire de tous les individus à travers le monde qui utilisent leur logiciel.
Il en va de même pour Stylo, LibreOffice, Ghostwriter, etc.

Si l'on s'arrête à la vision superficielle du texte, comme le propose Goody, on
ne voit que les éléments graphiques mais nous oublions aussi ceux qui sont
invisibles et disparaissent sous la page écranique.

Certes les interfaces d'écriture sont présentées sous la forme de gabarit que
l'on doit remplir, comme c'est par exemple le cas des logiciels de création de
diapositives dont chacune est découpée en sections contenant tour à tour des
images, des titres ou du texte.

Nous avons affaire à une construction visuelle du document, dont la lecture
repose sur des conventions culturelles de lecture.
À ce sujet, Tufte a publié un article sur les PowerPoint ...

Toutefois, l'assujetissement à l'architexte dépasse cette surcouche graphique et
concerne également la sous-couches invisibles de structuration textuelle du
texte, mais aussi tout le processus d'inscription du document sur son support et
les méthodes pour y accéder.
Comme nous l'avons précédemment, ce n'est pas l'image du texte affichée à
l'écran qui est sauvegardée et archivée mais bien une suite de caractères
binaires dont l'écriture intermédiaire est une suite de symboles, de chiffres et
de lettres.
Dans le cas de certains logiciels propriétaires, comme le logiciel Pages édité
par la firme Apple, le document n'est lisible que dans un environnement
spécifique et dédié au détriment d'autres environnements d'écriture et lecture.
Un document dont le format est `.pages` ne sera pas lisible dans un
environnement Linux ou Windows.

F. Kittler évoquait une écriture aveugle en s'appuyant sur le cas de la cécité
de Nietzsche et de sa machine à écrire lui permettant d'écrire malgré sa
condition.
À partir de cet exemple, Kittler démontre que l'écriture ne peut plus être
définie selon l'acte de lecture qui l'accompagne.
Voir la contradiction avec la controverse sur l'écriture montrée précédemment.

Ce phénomène est aussi applicable à l'ordinateur et plus largement au numérique.
Le non capacité de lecture/interprétation d'un texte par un ordinateur dans le
cas d'un document dont le format n'est pas déchiffrable n'empêche pas
l'ordinateur d'écrire à cet emplacement même.

Ajouter l'exemple de Kenneth Goldsmith.

De la même manière, le type de support sur lequel est sauvegardé une information
pose les questions d'accessiblité, de perennité, d'interopérabilité, etc...
L'exemple illustrant au mieux cette question est la disquette : qui aujourd'hui
peut lire le contenu d'une disquette ?

Reprendre Kittler sur le mode protégé et le logiciel n'existe pas sur
l'assujetissement.

L'auteur devient « usager » = sujet (assujetti) aux logiciels...

## Cas d'étude : Stylo
### Qu'est-ce que Stylo ?
#### Grandes lignes sur Stylo
Stylo est un éditeur de texte sémantique développé pour l'écriture en sciences
humaines et sociales par la Chaire de recherche du Canada sur les écritures
numériques.

L'objectif derrière Stylo est de ...

Historiquement, Stylo est le fruit d'une discussion commencée en 2017, à
laquelle se joint officiellement Huma-Num en 2020.
#### Stylo à la CRCEN et à Huma-Num
#### Les briques logicielles
### Les formats pivots de Stylo en détail
#### La sérialisation des métadonnées en YAML
#### L'écriture en Markdown
#### La saisie des références bibliographiques en BibTeX
### Ce que Stylo permet ou non de faire