From 76c60d78d4603c0f12428b9def262f8bd5288c33 Mon Sep 17 00:00:00 2001 From: RochDLY Date: Wed, 15 May 2024 19:10:57 +0200 Subject: update billet sur la saisie du texte dans une nouveau document MIME-Version: 1.0 Content-Type: text/plain; charset=UTF-8 Content-Transfer-Encoding: 8bit redistribution de l'étude de cas (Stylo) dans le chapitre et réalisation de quelques transitions entre les parties + les liens à la problématique. Il faut encore faire ce travail là pour la fin du chapitre et peut-être voir où remettre la déprise (peut-être la mettre en ccl). Attention il faudra faire une relecture globale car risque majeur de redondance. En ccl il faudra faire le rappel de toutes les mini-ccl intermédiaires pour bien répondre à la pb. --- ...a-saisie-du-texte-dans-un-nouveau-document.html | 307 +++++++++++++++++++-- 1 file changed, 290 insertions(+), 17 deletions(-) (limited to 'docs/posts') diff --git a/docs/posts/2024-05-06-la-saisie-du-texte-dans-un-nouveau-document.html b/docs/posts/2024-05-06-la-saisie-du-texte-dans-un-nouveau-document.html index 80d65fe..450fa97 100644 --- a/docs/posts/2024-05-06-la-saisie-du-texte-dans-un-nouveau-document.html +++ b/docs/posts/2024-05-06-la-saisie-du-texte-dans-un-nouveau-document.html @@ -36,19 +36,18 @@
  • Une médiation par l’écrit
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  • Conclusion
  • Bibliographie
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    Avec ce chapitre, nous commençons à détailler la relation qu’entretiennent un auteur et un ordinateur dans l’acte d’écriture scientifique dans un environnement numérique1.

    Ce dispositif que nous venons de décrire fait écho aux théories de l’éditorialisation (Vitali-Rosati, 2018) et de l’énonciation éditoriale (Souchier, 1998). Ainsi, cette écriture numérique n’est plus définie en tant que fruit d’une seule fonction auctoriale, mais l’est par un ensemble de fonctions éditoriales dont la fonction auctoriale fait partie.

    Selon ce cadre théorique, et puisque notre hypothèse positionne l’intime en tant que produit de l’écriture, nous pouvons nous demander quelle est la contribution de l’environnement d’écriture à cet intime lors de la saisie d’un texte dans un document.

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    Ainsi, parmi toutes les fonctions éditoriales que l’on pourrait énumérer, nous nous intéressons dans ce chapitre à la saisie du texte et à l’environnement support (zacklad_organisation_2012?) dans lequel il s’inscrit. Lors de cette phase de l’écriture, cet environnement devient le lieu où se manifeste un trouble entre ce que l’usager à l’intention d’écrire et le document que produit la machine, qui est structuré selon les formats et protocoles implémentés à l’intérieur de l’environnement. Ce trouble nait de la rencontre entre une représentation du texte structurée graphiquement et une représentation du texte structurée par du texte, comme c’est le cas pour une page web interprétée par un navigateur et son pendant au format HTML. Notre intérêt se porte sur plus particulièrement sur le côté machine de cette interaction humain-machine et comment elle perçoit, reçoit et traite les informations pour produire le document à travers un environnement particulier.

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    Ainsi, parmi toutes les fonctions éditoriales que l’on pourrait énumérer, nous nous intéressons dans ce chapitre à la saisie du texte et à l’environnement support (zacklad_organisation_2012?) dans lequel il s’inscrit. Lors de cette phase de l’écriture, cet environnement devient le lieu où se manifeste un trouble entre ce que l’usager à l’intention d’écrire et le document que produit la machine, qui est structuré selon les formats et protocoles implémentés à l’intérieur de l’environnement. Ce trouble nait de la rencontre entre une représentation du texte structurée graphiquement et une représentation du texte structurée par du texte, comme c’est le cas pour une page web interprétée par un navigateur et son pendant au format HTML. Notre intérêt se porte plus particulièrement sur le côté machine de cette interaction humain-machine et comment elle reçoit et traite les informations pour produire le document à travers un environnement particulier.

    Afin de traiter cette problématique, nous nous appuyons dans un premier temps sur les particularités de l’écriture numérique (Souchier, 2019; bouchardon_lecriture_2014?; crozat_ecrire_2016?) et sur le fonctionnement de la machine pour illustrer, dans une deuxième partie, le rôle de médiation joué par les logiciels – entendu comme une suite d’instructions écrites – entre la saisie du texte au clavier et les traitements appliqués à ces informations, jusqu’à leur stockage dans une mémoire informatique.

    Tandis que chaque environnement a ses propres modalités d’écriture que nous ne pouvons pas toutes énumérer, nous nous appuyons dans la deuxième partie de ce chapitre sur l’étude de l’éditeur de texte sémantique Stylo et les différentes représentations du texte qu’il génère. Ces représentations intermédiaires circulent entre les espaces de Stylo – client et serveur – par différents canaux et protocoles pour former, à travers une série de documents produits, une dynamique constitutive du sens de l’écriture (Merzeau, 2013) propre à cet environnement.

    Stylo est un éditeur de texte sémantique en ligne développé pour l’édition savante en sciences humaines et sociales (SHS) et en lettres. Stylo est autant un projet de recherche qu’un outil d’écriture et d’édition, qui entend poser une question décisive : qu’est-ce qu’écrire en environnement numérique en SHS ?

    C’est un outil libre et open source conçu en 2017 par la Chaire de recherche du Canada sur les écritures numériques (CRCEN) (vitali-rosati_ecrire_2020?), et soutenu depuis 2020 par les Très grande infrastructure de recherche Huma-Num. Guillaume Grossetie et Thomas Parisot, tous deux développeurs, maintiennent et développent l’infrastructure technique de Stylo avec la CRCEN depuis plusieurs années, équipe dans laquelle je suis fortement impliqué depuis le début de l’année 2022.

    Stylo a pour objectif de transformer le flux de travail numérique des revues savantes en SHS. En tant qu’éditeur de texte sémantique WYSIWYM, il vise à améliorer la chaîne de publication académique (kembellec_lerudition_2020?), tout en invitant à une réflexion théorique et pratique sur nos façons d’écrire et d’éditer.

    Prendre le contrôle de son propre texte, voilà ce que permet aujourd’hui Stylo à travers plusieurs fonctionnalités fondatrices ou toutes nouvelles – depuis la version 3.0 – qui s’inscrivent dans le domaine des technologies de l’édition numérique (blanc_technologies_2018?) : balisage du texte pour une structure sémantique fine, import de données bibliographiques structurées depuis l’application Zotero, mot-clés contrôlés depuis plusieurs ontologies, prévisualisation avec la possibilité d’annoter avec Hypothesis, génération de plusieurs formats (HTML, PDF, XML ou DOCX), export respectant les standards de l’édition scientifique, fonctions avancées de rechercher-remplacer, édition collaborative simultanée, accès aux données via une API GraphQL, etc. Contrairement aux outils de traitement de texte tels que Microsoft Word ou LibreOffice, Stylo cherche à promouvoir et à encourager l’utilisation de standards ouverts.

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    Au coeur de Stylo ce sont donc les formats de balisage Markdown, de sérialisation de données YAML ou encore de structuration de références bibliographiques BibTeX qui offrent la possibilité de produire plusieurs formats de sortie depuis une source unique. Stylo suit donc le principe de single source publishing (fauchie_fabriquer_2024?). Pandoc, le « couteau suisse de l’édition », génère les formats de sortie PDF (avec l’aide de LaTeX), HTML, XML-TEI ou encore DOCX.

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    Au coeur de Stylo ce sont donc les formats de balisage Markdown, de sérialisation de données YAML ou encore de structuration de références bibliographiques BibTeX qui offrent la possibilité de produire plusieurs formats de sortie depuis une source unique. Stylo suit donc le principe de single source publishing (fauchie_fabriquer_2024?). En s’appuyant sur Pandoc, un outil de conversion de documents désigné comme le « couteau suisse de l’édition », le module d’export de Stylo génère les formats de sortie PDF (avec l’aide de LaTeX), HTML, XML-TEI, DOCX ou encore XML compatible avec le schéma COMMONS commun à Métopes, Cairn et OpenEdition.

    Le choix d’étudier Stylo comme terrain pour cette recherche découle de plusieurs raisons. Tout d’abord, il s’agit d’un éditeur moderne construit avec les technologies du Web les plus récentes. Cet environnement Web suscite un certain engouement auprès des utilisateurs, notamment pour sa capacité à offrir un espace de travail collaboratif en temps réel leur permettant d’écrire à plusieurs dans cet espace. La deuxième raison qui fait de Stylo un terrain opportun est l’accessiblité de son code source. Contrairement à d’autres éditeurs propriétaires comme l’est GoogleDoc, la totalité du code de Stylo est disponible en ligne, ce qui est indispensable pour notre étude. Enfin, le fait d’être impliqué dans les développements de Stylo depuis plus de deux ans m’offre une position privilégiée pour étudier cet éditeur puisque j’ai accès aux différentes phases de tests des développements, me permettant ainsi d’observer le comportement des nouvelles fonctionnalités et de les modifier. Grâce à cette position, j’ai également un accès direct à la communauté d’utilisateurs, s’élevant à un peu plus de 6000 personnes fin 2023 pour plus de 40000 documents différents.
    Du fait de mon implication dans Stylo, le regard que je porte sur ce terrain n’est pas neutre et relève d’une forme de recherche-action [ajouter une référence].

    Alors que chaque signe et chaque trace inscrite (christin__1999?; vitali-rosati__2020?) dans l’éditeur de texte Stylo incarne cette tension entre l’utilisateur et la machine, dont les différences de langage – naturel et machine – rend a priori toute communication directe impossible, nous analysons les différents modes de communication des informations dans Stylo pour suivre les traces de l’intime qui y circulent. Pour en découvrir plus sur cet entre, nous étudions cette distance à partir de la méthode employée par le théoricien des médias F. Kittler (F. Kittler, 2018; 2015), qui s’appuie d’abord sur la description du fonctionnement de la machine à écrire puis celle de l’ordinateur afin de comprendre leur implication, en tant que média, dans le phénomène qu’est l’écriture. Cette méthode implique de comprendre les comportements et les fonctionnements techniques des composants à l’oeuvre dans la machine, et cela qu’ils relèvent du matériel ou du logiciel. En conséquence, nous mobilisons de la documentation technique pour étayer notre propos et pour analyser les traces qui nous intéressent.

    @@ -102,7 +101,8 @@ Du fait de mon implication dans Stylo, le regard que je porte sur ce terrain n

    L’écriture numérique est ainsi à distinguer de l’écriture dans un environnement numérique : un ordinateur, Internet, le Web, une calcultrice ou une machine à écrire de la dernière génération. En tant qu’abstraction, l’écriture numérique est une représentation du monde donnée, dont la qualification à travers un medium permet de l’incarner physiquement et matériellement mais pas de la circonscrire. En somme, cette représentation numérique du monde n’est pas nouvelle et ce n’est pas l’ordinateur qui l’a apporté. À notre connaissance, son origine remonte aux prémisses de l’écriture et des développements des systèmes monétaires, nous dirait C. Herrenschmidt (herrenschmidt_les_2023?).

    Dorénavant, lorsque nous ferons référence à l’écriture numérique nous parlerons d’une écriture numérique dans un environnement informatique.

    Les particularités de l’écriture numérique

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    L’écriture numérique diffère d’une écriture plus traditionnelle – par exemple manuscrite – et se distingue notamment par trois caractéristiques que sont la calculabilité (crozat_ecrire_2016?), la variabilité (bouchardon_lecriture_2014?) et la rupture sémiotique entre le geste d’écriture et l’inscription sur le support (Souchier, 2019).

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    Avant d’entamer une réflexion sur l’écriture numérique, convenons d’une brève définition l’écriture, car celle-ci a fait couler beaucoup d’encre à son sujet, notamment depuis sa reconfiguration numérique au crépuscule du 20e siècle. La définir tient généralement de l’anthropologie, des lettres, de la sémiotique ou encore des sciences de l’information et de la communication ou de l’étude des médias et cela pour ne mentionner que certaines disciplines de la sphère académique. Très largement, l’écriture est entendue comme « mode d’expression » et « fonction de communication » au sein d’une société (christin_les_1999?). Anne-Marie Christin distingue deux tendances principales de l’origine de l’écriture : l’écriture selon la trace, étant soit comprise comme le signe verbal transposé sur un support soit comme la marque laissée par un corps, ou l’écriture selon le signe dans son sens étymologique d’« événement inaugural [qui] participe d’une révélation » tant qu’il s’inscrit dans un « système » tel que la disposition des entrailles d’une bête sacrifiée lors d’une cérémonie (christin_les_1999?; vitali-rosati_quest-ce_2020?). À défaut de prendre parti pour l’un ou l’autre de ces paradigmes, nous pouvons retenir deux caractéristiques qui leur sont communes et que l’on retrouve dans tous types d’écriture, même numérique. Lorsque l’écriture est convoquée, elle fait appel à deux actions : l’inscription et l’interprétation. Qu’il s’agisse d’une trace ou d’un signe, retenons que l’écriture est toujours inscrite sur un support et que cette inscription fait l’objet d’une lecture et d’une interprétation. Cette association apparaît régulièrement dans les travaux qui traitent de l’environnement numérique, par exemple sous l’appellation de littératie numérique chez Milad Doueihi (doueihi_grande_2011?) ou de lettrure chez Emmanuel Souchier (souchier__2012?).

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    Toutefois, l’écriture numérique diffère d’une écriture plus traditionnelle, telle que nous venons de la défnir, et se distingue notamment par trois caractéristiques que sont la calculabilité (crozat_ecrire_2016?), la variabilité (bouchardon_lecriture_2014?) et la rupture sémiotique entre le geste d’écriture et l’inscription sur le support (Souchier, 2019).

    La première caractéristique est d’ordre computationnel : l’écriture devient calculable et peut donc faire l’objet d’instructions. Pour réaliser cette action, on procède à une équivalence où chaque signe que l’on peut inscrire dans cet environnement à son pendant unique sous forme de bits. Lorsque chaque caractère peut être identifié en tant que nombre, il devient possible d’implémenter ce modèle dans une machine et de lui demander, grâce à des instructions, d’appliquer des calculs.

    L’exemple idéal pour illustrer cette caractéristique n’est rien de moins que la machine imaginée par Alan Turing, qu’il présente en 1936 dans son article « On Computable Numbers, with an Application to the Entscheidungsproblem » dans la section Computing machines (turing_computable_1936?). Ce que Turing décrit n’est pas une machine physique mais un modèle théorique, une machine abstraite fondamentale pour les développements futurs de l’informatique. Cette machine est constituée de plusieurs éléments :